vendredi 28 septembre 2012

Mort ou vif (1994)


Avant d'exploser le box-office avec la trilogie "Spiderman", Sam Raimi s'est forgé un nom (et un talent) dans le cinéma d'horreur avec la trilogie (encore) "Evil Dead", devenue une référence chez les amateurs de cinéma de genre. Entre ces deux époques, après un "Darkman" qui lui ouvrit les portes des grands studios, il a fait ses premiers pas à Hollywood avec un western à une époque où ce genre était tombé en désuétude : "Mort ou vif" (dont le titre original "The quick and the dead" est mille fois plus évocateur). Régulièrement diffusé sur la TNT (merci à elle qui me fournit tant de matière pour ce blog), ce film n'a, lors de sa sortie en salles, pas rencontré un franc succès, malgré un casting plutôt haut de gamme.

Dans l'Ouest américain, oubliée par la loi et l'espoir, la petite ville de Redemption vit sous la coupe de John Herod. Chaque année, un tournoi de tir y est organisé, qui récompense le gagnant d'une rondelette somme. Une jeune et belle étrangère s'y inscrit, bien décidée à tuer Herod, pour se venger de ce qu'il lui fit subir naguère.

On en conviendra, le pitch de "Mort ou vif"' est des plus classiques, comme souvent dans le western. Sam Raimi obéit aux lois du genre : un lieu unique, des personnages ultra-typés, une intrigue simple. Mais s'il semble respecter les codes du western, c'est pour se les approprier. La réalisation de "Mort ou vif" est en effet à mille lieues de ce qu'on a l'habitude de rencontrer sur ce type de film. Ici, pas de longs plans à la Sergio Leone, ni de grands panoramas sur l'Ouest sauvage. Les séquences sont courtes, les zooms sont nombreux, les dialogues sont lapidaires.
Quant à la violence, elle n'est pas suggérée, comme c'est usuellement le cas dans les classiques de ce genre : je songe notamment au plan où l'on voit le tireur vainqueur par le trou que sa balle vient de faire dans le crâne de sa victime ! Fidèle à son parcours, c'est donc une mise en scène quelque peu iconoclaste que Sam Raimi impose à son film.

Au niveau de l'interprétation, peu de reproches sont à faire au casting (de haute volée).
Sharon Stone, alors encore auréolée de son statut d'actrice sexy post "Basic Instinct", incarne avec sobriété son personnage de tireuse vengeresse. Gene Hackman se délecte visiblement à jouer les salauds. Leonardo di Caprio, pas encore starisé (c'est d'ailleurs assez amusant de le revoir à cette période), joue parfaitement le blanc-bec agaçant. Notez aussi la présence du grand Russel Crowe, qui n'était pas encore la vedette qu'il devint avec "Gladiator".  Vous remarquerez aussi, dans des rôles plus secondaires, d'acteurs remarquables comme Lance Henriksen, le Bishop d'Alien), mais aussi Pat Hingle (le commissaire Gordon des "Batman" de Tim Burton) ou Gary Sinise (dans un rôle court, mais important).

Ajoutez à cela une bande originale (signée Alan Silvestri) digne d'un classique du genre, évoluant entre originalité et hommage aux canons du western-spaghetti.

Au chapitre des reproches à faire aux films, il y a finalement peu de choses. J'ai noté une VF déplorable (encore une fois !), en particulier pour Leonardo di Caprio, qu'on a envie de gifler chaque fois qu'il l'ouvre. C'est peu et ça n'explique en rien le bide que rencontra ce film à sa sortie. Sans doute peut-on faire le même constat que celui que je fis pour "Pirates" de Polanski : "Mort ou vif" n'était pas en phase avec son époque. A l'instar du film de pirates, le western est un genre appartenant au passé, et pour rencontrer le succès, il doit être exceptionnel (comme le furent en leur temps "Danse avec les loups" ou "Impitoyable", par exemple). Ce film-là, bien que doté d'une réalisation plutôt "rock'n roll", ne bouleverse pas le genre (ce n'était d'ailleurs pas son but), mais réalise sa mission honnêtement. 

Si vous êtes amateurs du genre, n'hésitez donc pas, à l'occasion d'une rediffusion, à visionner ce film. Ce n'est pas le western du siécle, mais un divertissement honnête, qui mérite amplement une deuxième chance.


mercredi 26 septembre 2012

Rorschach

"Ce monde sans gouvernail n'est pas formé par de vagues forces métaphysiques.
Ce n'est pas Dieu qui tue les enfants,
ni la malchance qui les massacre,
ni le destin qui les fait dévorer par les chiens.

C'est nous.
Rien que nous."

Watchmen
(Alan Moore, Dave Gibbons)

lundi 24 septembre 2012

Phénomènes (2008)



Sans vouloir aucunement m'acharner sur M. Night Shyamalan, voici un second billet (après celui sur "La jeune fille de l'eau") consacré à l'un de ses films. Mais, après tout, il "suffirait" que celui en qui le cinéma fonda tant d'espoir renoue avec le succès pour qu'il cesse de hanter ces colonnes, non ?

Il faut croire qu'après avoir démarré au sommet de l'art de la mise en scène, il était inévitable pour M. Night Shyamalan que la chute continue. L'échec dont il est question ici est plus artistique et critique que financier, il faut le préciser. Le film "Phénomènes" ("The happening" en VO) ne fut pas un désastre financier, mais il consacra l'idée que M. Night Shyamalan avait définitivement perdu son statut de petit génie.

Voici un rapide aperçu de l'intrigue : à New-York, puis dans tout le Nord-Est des Etats-Unis, des dizaines de personnes se suicident sans aucune raison apparente. Fuyant le danger, mis sur le compte d'un nouveau genre de terrorisme, un groupe de survivants comprend vite que les plantes ont développé un mécanisme de défense face à la menace que représente l'humanité.

Un pitch qui utilise les poncifs du film-catastrophe pour alimenter une fable écologique, en voilà une bonne idée, pourrait-on penser. Mais, si une idée, aussi généreuse soit-elle, réussissait à remplir un film, ça se saurait. "Phénomènes", hélas, ne fait que confirmer l'inquiétante impression qu'avait laissé "La jeune fille de l'eau" : M. Night Shyamalan ne base plus ses films que sur des idées, là où il lui faudrait nous conter des histoires.

Reconnaissons encore une fois le talent de mise en scène dont fait preuve le réalisateur (avec plus de sobriété que dans ses précédents opus, cela dit), et la solide interprétation des acteurs, sans doute fort bien dirigés. Mark Wahlberg, Zooey Deschanel et John Leguizamo servent admirablement leurs rôles et semblent croire de toute leur force à un scénario bien mince.
Toutes ces qualités ne suffisent hélas pas à assurer la réussite d'un film. Il faut pour cela faire vivre aux protagonistes une véritable histoire qui tienne, si possible, les spectateurs en haleine. On assiste dans "Phénomènes" à un voyage tenant plus de la fuite en avant que de l'épopée initiatique. Là où Spielberg (dans "La guerre des mondes") réussissait son coup, M. Night Shyamalan échoue. Le parallèle que je fais avec le très sombre blockbuster de Spielberg n'est pas anodin. Dans les deux cas, l'humanité est en proie à une menace qui la dépasse et se doit de faire face en changeant son comportement. Et, dans le cas de "Phénomènes", il n'y a pas de réel dénouement : tout s'arrange d'un coup, ou presque...ou pas.

Il est dommage que ce film post-11 septembre n'ait pas eu plus d'épaisseur et, finalement, de sens. C'eût été l'occasion rêvée pour M. Night Shyamalan de réussir son retour au panthéon. Faute d'un script plus consistant, "Phénomènes" devient vite ennuyant. Le scénario tient sur un ticket de métro (et encore, en utilisant le recto uniquement).
On admirera le message, mais un court métrage eut suffi.


vendredi 21 septembre 2012

La jeune fille de l'eau (2006)



Quand on contemple la filmographie de M. Night Shyamalan, force est de reconnaître que le succès de ses films a suivi une pente dangereuse. Propulsé au panthéon du septième art dès son troisième long métrage, le remarquable "Sixième sens" (suivi par l'excellent "Incassable"), ce jeune prodige spécialiste du twist final a connu, à partir de "Signes", le désamour du public et de la critique. Comme s'il avait perdu (définitivement ?) la grâce, M. Night Shyamalan, qui ambitionnait à l'époque de réaliser l'un des volets de la franchise Harry Potter, essuya son premier vrai échec avec "La jeune fille de l'eau" (qui coûta plus qu'il ne rapporta). Ce bide était-il inévitable ?

Un jour, le gardien d'un immeuble découvre dans la piscine de la résidence une jeune nymphe, qui se dit poursuivie par des créatures maléfiques venues du monde qui est le sien. Il lui faudra l'aide de chacun des habitants de l'immeuble pour réussir à retourner là d'où elle vient.

Dans ce conte de fées urbain, M. Night Shyamalan fait encore une fois preuve de son talent de réalisateur, sachant admirablement bien organiser ses plans et séquences, et maîtrisant la direction d'acteurs avec le talent qu'on doit lui reconnaître. Mais, ce qui pêche, c'est le scénario, diablement maigre.

Après la découverte des différents protagonistes et du décor de l'intrigue, le film se réduit à une succession d'épreuves que doit franchir la petite communauté réunie autour de la nymphe afin de l'aider à retourner chez elle. Le spectateur qui s'attend à être surpris ne le sera que peu, voire pas du tout. Tout ce qui se déroule dans cette histoire est attendu et l'on sort de la projection avec une étrange impression d'avoir perdu son temps.

Certes, ce film est réalisé avec la plus grande sincérité, et remarquablement filmé, mais la forme ne suffit pas à faire un grand film, si le fond est absent. On pourrait m'opposer le fait que des thèmes forts sont abordés, dans "La jeune fille de l'eau". Les personnages (celui interprété par Paul Giamatti en premier lieu) ont des failles et des richesses que la nymphe vient révéler, la communauté qui s'unit autour d'elle est riche de symboles, le décor très urbain de cette fable fantastique n'est pas anodin.
Tout cela est vrai et, en se penchant de près sur cet étrange objet filmique, on pourrait y trouver un nouveau sens. Mais, pour que cela fonctionne, il aurait fallu donner à "La jeune fille de l'eau" un autre statut que celui qui fut le sien à la sortie, et mieux guider son public, quitte à limiter celui-ci.

Au rayon des points positifs de ce film, hormis la réalisation et l'esthétique sans faille, le travail des acteurs est en tous points remarquables. Mené par un Paul Giamatti fabuleux dans son rôle d'homme abîmé, l'ensemble du casting (dont Bryce Dallas Howard, qui apporte à la nymphe une fragilité quasiment tangible) est au diapason. Il apparaît d'autant plus regrettable que tout cela ne fonctionne finalement pas.

Doté d'un pitch particulièrement léger, "La jeune fille de l'eau" ne pouvait que décevoir le grand public, visé par le cinéaste (et les studios produisant ce film). Pour apprécier ce conte à sa juste valeur, il convient de le destiner à des spectateurs désireux de se l'approprier et d'y lire les angoisses du réalisateur, quant au monde qui l'entoure.

On a souvent dit que M. Night Shyamalan retrouverait le succès s'il se contentait d'être réalisateur et engageait un scénariste. Avec ce film, on ne peut que reconnaître que c'est vrai, et espérer qu'il entende un jour cette critique constructive.

A vouloir faire un blockbuster d'un film qui aurait du rester dans le créneau très étroit des films dits "indépendants" (voire d'auteur), M. Night Shyamalan ne pouvait donc qu'échouer. La première victime de cette ambition déplacée, de ce malentendu, est la jeune fille du titre.
Dommage pour elle...



dimanche 16 septembre 2012

La vie d'une autre (2012)


Première réalisation de la comédienne Sylvie Testud (auréolée de succès notamment pour son interprétation de Françoise Sagan dans le biopic qui lui fut consacré), "La vie d'une autre" est un film inspiré du roman éponyme de Frédérique Deghelt.
Sorti au début de l'année, il était porté par un duo d'acteurs qu'on ne présente plus : Juliette Binoche et Matthie Kassovitz. Malgré cela, ce film ne connut pas le succès qu'on avait prévu pour lui. Quelques mois après sa sortie en salles, alors qu'il est possible de le visionner chez soi, penchons-nous sur le cas de ce long métrage.
Un beau matin, Marie se réveille à quarante ans, sans avoir le moindre souvenir des quinze années écoulées. Elle se découvre mariée à un dessinateur de BD et mère d'un petit garçon, mais se rend également compte qu'elle n'est pas forcément celle qu'elle croyait : durant ces années disparues de sa mémoire, elle est devenue une femme d'affaires féroce et son couple vire au cauchemar...

Un soupçon de fantastique dans un film français, voilà qui n'est pas si courant. La chose est osée, et n'a pas toujours donné les meilleurs effets. Par charité, je tairais les noms de ceux qui s'y frottèrent sans bonheur. Point n'est besoin de tourner autour du pot : "La vie d'une autre" fait partie, hélas, de cette catégorie.

Hésitant entre comédie (un travers commun à beaucoup de films jouant sur le voyage dans le temps), film romantique et drame intimiste sur le temps qui passe, "La vie d'une autre" est un film bancal qui ne sait trop sur quel pied danser. La faute en incombe à un scénario hésitant, multipliant les longueurs.

L'interprétation est pour le moins inégale : Juliette Binoche a rarement été aussi peu convaincante, jouant l'exubérance au risque de ruiner la crédibilité de son personnage. S'il s'agit sans l'ombre d'un doute d'une actrice extrêmement douée, la façon dont elle aborde ce rôle est pour beaucoup dans l'agacement qu'elle provoque. Mathieu Kassovitz, quant à lui, fait ce qu'il peut pour sauver ce qui peut l'être, mais donne l'impression d'assister impuissant à un naufrage. 

Pour son coup d'essai, Sylvie Testud a sans doute mal choisi son premier long métrage. Qui trop embrasse, mal étreint, dit l'adage populaire, et il est conforté par cette réalisation. A vouloir se faire croiser trop de genres en une seule histoire, la réalisatrice tente un mélange hétérogène qui s'avère insipide.

Il faut le reconnaître : ce film est raté, tout simplement. Même si, sur le papier, le pitch était prometteur, "La vie d'une autre" est une déception.



mercredi 12 septembre 2012

Cowboys et envahisseurs (2011)



Les plus observateurs l'auront remarqué : l'adaptation de comics est à la mode. Nos super-héros préférés (ou pas) ont l'honneur de maints longs métrages et les transpositions d'oeuvres en provenance du monde de la BD (à prendre au sens large) envahissent nos écrans (ad nauseam, irais-je jusqu'à dire). Au milieu des poids lourds que représentent les licences Batman, Spiderman, The Avengers ou Superman (dont le reboot signé par Snyder ne saurait tarder), quelques transpositions plus mineures permettent de donner un coup de projecteur sur des oeuvres moins connues du grand public. Parmi elles, on citera "Kick-Ass",  "Green Lantern" ou "Jonah Hex", par exemple. "Cowboys et envahisseurs" fait indéniablement partie de cette catégorie d'oeuvres graphiques dont l'adaptation profite de cette grande vague. Mis en scène par Jon Favreau, à qui l'on doit les deux premiers "Iron Man", ce film n'a pas eu l'heur de séduire le large public qu'on pouvait penser.

Annoncé avec moult battage médiatique, ce téléscopage improbable entre western et science-fiction aurait pu cartonner, au box-office. Il n'en fut rien et ce film a vite quitté l'affiche, à peine rentabilisé par le marché international. Pourtant, le casting était des plus alléchants : Daniel Craig (le nouveau James Bond, pour ceux qui auraient passé les dernières années dans le coma) et Harrison Ford (plutôt mal inspiré en matière de choix de rôles ces dernières années) mènent le bal. Et on pouvait espérer que le pitch audacieux donnerait un divertissement de bonne facture, voire un grand film.

A propos de pitch, je vais être bref : un amnésique se réveille en plein désert, avec au bras un étrange bracelet. Son chemin va le mener à Absolution, ville sous la coupe de l'inquiétant Colonel Dolarhyde. Face à des menaces venues d'ailleurs, tous vont devoir unir leurs forces.

Comme je le signalais, il y a de l'audace dans le postulat de base. Il est dommage que la mise en oeuvre ne soit pas à la hauteur. Inutile d'y aller par quatre chemins : le film ne tient pas ses promesses. Qu'il s'agisse du scénario qui n'exploite pas la richesse potentielle de l'univers, ou de la réalisation qui hésite entre western et science-fiction sans réussir à choisir l'un ou l'autre, "Cowboys et envahisseurs" se révèle être un film d'action sans intérêt.

Jon Favreau, qui avait pourtant réussi son coup avec "Iron Man", se révèle ici un piètre metteur en scène, se contentant d'une réalisation digne d'un téléfilm de deuxième partie de soirée. Incapable d'entraîner le spectateur dans l'aventure, et ne disposant pas d'une histoire suffisamment emballante, il se satisfait du minimum syndical.

Côté casting, là aussi, les promesses ne sont pas tenues. On a  beau adorer Harrison Ford (à qui le chapeau va très bien) et Daniel Craig (excellent James Bond, mais je m'égare), force est d'avouer que "Cowboys et envahisseurs" n'est qu'un film bien mineur dans leur carrière et qu'ils semblent s'en rendre compte, tant et si bien qu'on a maintes fois l'impression que ces deux stars remplissent leur contrat, point barre.
A leurs côtés, le reste du casting fait de son mieux, mais sans la conviction nécessaire : on notera la présence, dans des petits rôles, de Paul Dano (vu dans "Little Miss Sunshine"), de Clancy Brown (le Kurgan de "Highlander", aperçu aussi dans "Pathfinder"), de Sam Rockwell ou d'Olivia Wilde (dans un rôle assez "plastique", il faut le reconnaître).

Alors, certes, "Cowboys et envahisseurs" est plutôt bien filmé, il n'est pas trop mal joué, et les effets spéciaux sont à la hauteur. Simplement, à aucun moment, l'histoire ne surprend le spectateur qui finit par s'ennuyer et n'évite de sombrer dans le sommeil que parce que ce film fait beaucoup de bruit....pour rien.



samedi 8 septembre 2012

Une vie moins ordinaire (1997)


Souvenez-vous, à la fin du XXème siècle, le cinéma britannique accoucha d'un petit génie, révélé par le cynique "Petits meurtres entre amis", puis confirmé par l'excellent "Trainspotting". Danny Boyle, réalisateur de ces deux pépites, céda rapidement aux sirènes d'Hollywood et, entraînant avec lui son acteur-fétiche, Ewan McGregor, prit les commandes de son premier film américain : "Une vie moins ordinaire". La descente fut à la hauteur de son ascension, puisque ce film fut le premier insuccès de son metteur en scène. En le revoyant, il y a peu, sur une des chaînes de la TNT, j'ai pensé qu'il avait toute sa place dans les colonnes de ce blog.

Dernier volet de la "Money Bag Trilogy" de Danny Boyle, "Une vie moins ordinaire" a pour héros Robert Lewis (Ewan MacGregor), technicien de surface de son état, apprenti romancier, dont le quotidien n'est guère enviable.En effet, il perd son emploi le jour où sa petite amie le quitte. Par un enchaînement de circonstances, il va se retrouver dans la peau d'un preneur d'otages, détenant Celine (Cameron Diaz), la fille de son patron (interprété par Ian Holm). Pendant ce temps, deux anges (Holly Hunter et Delroy Lindo) sont envoyés sur Terre avec un ultimatum : si Celine et Robert ne tombent pas amoureux, le ciel leur est désormais interdit.

Plutôt atypique, ce pitch, non ? Mix improbable entre la comédie romantique et le road-movie fantastique, "Une vie moins ordinaire" clôture donc la trilogie "Money bag" de Danny Boyle, consacrée au besoin incessant d'argent, commencée avec "Petits meurtres entre amis" et poursuivie avec "Trainspotting". Cela dit, les films étant totalement indépendants, je vous rassure, il n'est pas nécessaire d'avoir vu les précédents pour visionner "Une vie moins ordinaire" (pas nécessaire, certes, mais conseillé, car il s'agit de films remarquables).

Le présent long-métrage, s'il ne connut pas le triomphe qu'on aurait pu attendre, mérite pourtant qu'on s'y attarde. Certes, il ne s'agit pas d'un "grand" Boyle, mais son rythme, sa fraîcheur en font un film plus qu'intéressant. A défaut d'un ton résolument "rock'n roll" (comme pouvait l'être le superbe "Trainspotting"), nous avons affaire là à une ballade "pop", souvent amrère, parfois sucrée, mais jamais guimauve.
Certes, l'intrigue est sans doute peu surprenante (quoiqu'on sorte déjà pas mal des sentiers battus), et le propos est moins noir qu'on ne pouvait s'y attendre. Mais, s'il s'agit clairement d'un film mineur dans la carrière de son réalisateur (et de celui qui marque le début d'une pente qui n'a que récemment cessé), "Une vie moins ordinaire" reste un film qui se regarde sans déplaisir et a plutôt bien vieilli.

Pour ne rien gâcher, comme souvent avec Danny Boyle, la bande originale vaut son pesant de cacahuètes et vous ramènera quelques années en arrière, au son de R.E.M., de Beck, de The Cardigans et de Prodigy (pour ne citer qu'eux). Rien que pour le plaisir de ré-écouter ces morceaux, le film mérite un revisionnage, à mon humble avis...
Alors, pourquoi "Une vie moins ordinaire" n'a-t-il pas triomphé comme l'avaient fait les précédents opus de Boyle ? En revisionnant ce film sur lequel quelques années ont passé, on est en droit de se poser la question. Certes, on ne retrouve pas ici le punch et l'irrévérence de ses premiers films, mais le talent de mise en scène est toujours là, indéniablement. Les interprètes sont remarquables, comme toujours (même si la version française est plus préjudiciable qu'autre chose)...

L'épisode suivant dans la carrière de Danny Boyle allait être le très raté "La plage" (en pleine Dicapriomania). Il allait falloir attendre le triomphe du très beau "Slumdog millionaire" pour voir ce réalisateur sortir du purgatoire.




mercredi 5 septembre 2012

Catwoman (2004)



Le personnage de Catwoman, récemment incarné avec brio par Anne Hathaway dans le dernier volet de la trilogie de Christopher Nolan, n'en est pas à sa première apparition sur le grand écran. Avant la très réussie prestation de la jolie brune aux côtés de Christian Bale, elle a eu les traits de la très féline Michelle Pfeiffer (dans le "Batman Returns" de Tim Burton), mais aussi (au petit écran), Julie Newmar et Eartha Kitt.
On a tendance à oublier que Catwoman a eu un film rien que pour elle...mais, à bien y réfléchir, cette amnésie est la bienvenue, eu égard au désastre que fut ce film, qui se voulait une exploration "parallèle" du personnage.
Un petit résumé, avant de s'attaquer aux qualités et défauts du film ?
Patience Phillips (le nom de Catwoman, dans le "civil", n'est pas Selina Kyle, dans cet opus), artiste timide, est assassinée par son perfide employeur dont elle a découvert les sombres desseins. Grâce à un chat, elle renaît sous la forme de la très féline Catwoman et va entreprendre de se venger.

Un pitch pareil, ça fait envie, non ?
Non, vous avez raison.

Au début des années 2000, quelques réalisateurs français ont été approchés par les studios américains et se sont frottés au cinéma "made in Hollywood". On se souvient, évidemment, du quatrième volet d'Alien, mis en scène par Jean-Pierre Jeunet (encore auréolé du triomphe du "Fabuleux destin d'Amélie Poulain"), du médiocre "Gothika" de Matthieu Kassovitz (avec Halle Berry, décidément bien mal inspirée). Pitof (de son vrai nom Jean-Christophe Comar), qui avait fait des merveilles en tant que magicien des effets spéciaux (notamment sur les films de Caro et Jeunet), commit en 2001, une adaptation cinématographique des aventures de "Vidocq", avec Guillaume Canet dans le rôle-titre.


Etre réalisateur, ce n'est pas seulement mettre en boîte des scènes et les relier tant bien que mal entre elles. Si c'était le cas, Michael Bay aurait depuis longtemps reçu un Oscar. Cet art consiste avant tout à raconter une histoire, en y croyant de préférence. Et pour cela, il faudrait disposer d'un scénario digne de ce nom (ce qui n'est pas le cas ici).

Un des autres points noirs de cette adaptation réside aussi dans la direction d'acteurs. Malgré un casting de standing (Halle Berry, Sharon Stone, Lambert Wilson, pour ne citer qu'eux), Pitof ne réussit à aucun moment à guider ses interprètes. Résultat : malgré tout le talent qu'on leur connait (Halle Berry reçut peu avant un Oscar pour "A l'ombre de la haine", rappelons-le),  tous donnent l'impression d'être mauvais, tandis que le réalisateur s'acharne à donner à "Catwoman" un style digne d'un jeu vidéo.

A sa sortie, "Catwoman" fut un four monumental, et reçut quelques Razzies Award, dont un pour son interprète principale (qui alla chercher sa "récompense" pour "this piece-of-shit, god-awful movie"). Que garder de cette adaptation visiblement atteinte d'hyperactivité ? Rien, sans doute, si ce n'est la plastique irréprochable de Halle Berry (que le costume de Catwoman met diablement en valeur).

Aux dernières nouvelles, Pitoff ne réalise plus de longs métrages. Ca n'est peut-être pas plus mal...




samedi 1 septembre 2012

Pirates (1986)


Attention, nostalgie en vue !
On ne présente plus Roman Polanski, réalisateur de films devenus des classiques (et d'oeuvres plus mineures, voire très oubliables, reconnaissons-le), et homme à polémiques (mais ce blog n'est en aucun cas le lieu). Si tous les cinéphiles connaissent les piliers de sa filmographie ("Rosemary's baby", "Le bal des vampires" ou, plus récemment "Le pianiste" et  "The ghost writer"), peu nombreux sont ceux qui se rappellent de "Pirates", hommage aux films de pirates qu'il réalisa au coeur des années 80, avec un budget pharaonique pour l'époque. Pensez donc : pour les besoins du film, il fallut construire le bateau au centre de l'histoire, navire qui fut cédé peu après à la ville de Cannes, pour le quarantième anniversaire du Festival du film.

C'est dire les moyens mis à la disposition de Polanski pour réaliser ce film, bien avant la ressurection du genre avec la série des "Pirates des Caraïbes". A l'époque, les effets spéciaux n'étaient pas ce qu'ils sont aujourd'hui, d'où (par exemple) la construction "en dur" du fameux vaisseau. Malheureusement, le succès du film ne fut pas à la hauteur de son budget. Roman Polanski dut passer par la case "théâtre" et retourner à des films moins ambitieux, après cette incursion dans le "grand spectacle".
Alors "Pirates" est-il un véritable ratage ? Ou un simple rendez-vous manqué avec le public ? 

Il faut bien reconnaître que ce film aurait mérité mieux, si vous voulez mon avis. Mené par une distribution fort honorable (le vétéran Walter Matthau en tête, mais aussi Cris Campion, jeune espoir de l'époque qui n'eut pas la carrière qu'on eut pu espérer pour lui), dans des décors hauts en couleur et mis en scène avec une réalisation sans faille, "Pirates" n'a finalement que peu de défauts, malgré un tournage cauchemardesque qui poussa Polanski à le renier. 
Carrément.

S'il est quelque chose à reprocher à "Pirates", c'est sans doute son scénario, un peu maigrelet, et qui hésite entre parodie et film d'aventures, comédie et romance. Du coup, le spectateur a du mal à s'attacher à l'histoire. Cela dit, ce genre de reproche pourrait s'appliquer à de nombreux films de ce genre, y compris ceux qui font désormais figure de classique. La vraie cause du peu de succès que rencontra ce renouveau d'un genre avant l'heure est sans doute le thème même qu'il aborde et met à l'honneur. L'heure n'était pas encore venue de donner une seconde chance aux pirates de cinéma. Quand Renny Harlin tenta de s'y frotter, avec "L'île aux pirates" en 1995, il connut à son tour un échec cuisant. Il faudra attendre les aventures de Jack Sparrow ("Pirates des Caraïbes") pour qu'ils connaissent une deuxième jeunesse.

A l'occasion d'une diffusion télévisée, ou plus probablement si le DVD vous passe à portée de mains, laissez-vous tenter par "Pirates" : il le mérite amplement.