mercredi 27 février 2013

Waterworld (1995)



Alors qu'il vient de recevoir un César d'honneur pour l'ensemble de sa carrière, il peut être intéressant de jeter un coup d'oeil dans le rétroviseur et de se pencher sur la carrière de Kevin Costner. Propulsé au rang de superstar en quelques films, l'acteur a expérimenté douloureusement l'adage qui veut que "la roche tarpéienne est proche du Capitole" (je sais, ça en jette un maximum, ce genre de citations). Ce discrédit coïncida grandement avec la sortie de "Waterworld", monstrueux bide financier en son temps, au budget explosé (175 millions de dollars) et à l'acueil désastreux (en partie causé par la médiatisation de son tournage délirant).
La suite de l'histoire est connue : les deux Kevin (Reynolds et Costner) se brouillèrent à mort à l'occasion du tournage cataclysmique de "Waterworld". Résultat, l'acteur enchaîna avec "Postman" (qu'il réalisa) qui fut également un bide, avant de perdre définitivement son statut de star des années 90. Quant au réalisateur, il enchaîna avec "187 code meurtre", puis "La vengeance de Monte-Cristo", avant de réaliser le très moyen "Tristan et Iseult" (dont j'ai déjà parlé ici).

Nous sommes au XXVème siécle. A force de réchauffement climatique, la catastrophe a eu lieu : la glace des pôles a fondu et l'eau a recouvert la quasi-intégralité de la planète. Les survivants se sont organisés en tribus, et certains sont en quête de Dryland, dernier bout de terre épargné. C'est à ce moment que surgit un individu étrange, seul sur son bateau...

Le genre post-apocalyptique a ses références et il est difficile de s'y frotter sans subir la comparaison. En l'occurrence, "Waterworld" peut être qualifié de "Mad Max aquatique". C'est plus précisément au deuxième volet de la trilogie australienne qu'il faut comparer ce film. Force est de reconnaître qu'il y a bien des similitudes entre les deux films, mais que "Waterworld" n'a pas l'efficacité brutale de "Mad Max 2". Et c'est là que se situe le problème. Vendu comme le blockbuster ultime (la tag-line était d'ailleurs "Rien de ce que vous avez vécu ne nous a préparé à...Waterworld"), ce film n'a finalement rien d'exceptionnel, hormis son budget démesuré. 

Réalisé par Kevin Reynolds, qui avait contribué à la gloire de Costner avec un Robin des Bois pourtant poussif, "Waterworld" est à bien des égards une simple copie de "Mad Max 2", et l'on pourrait s'amuser à faire moult parallèles entre les deux films. C'est ludique, certes, mais en aucun cas mémorable.

Les acteurs en font des tonnes, chacun dans leur registre. Entre un Costner souvent mutique, un Hopper outrancier et une Jeanne Tripplehorn décidée qui connait son plus grand rôle, tous accomplissent leur tâche avec excès, mais dans pareil cas, on est prêt à leur accorder le bénéfice du doute.
Le scénario de "Waterworld" (auquel avait tout de même collaboré un certain David Twohy, qui fit sensation avec "Le fugitif" quelques années plus tôt) est sans doute son plus gros défaut. Jamais surprenant, rarement audacieux, le script se contente de dérouler une histoire prévisible, utilisant sans vergogne tous les clichés imaginables. 

C'est assez mal réalisé, certes, mais ça vaut bien n'importe quel Michael Bay (ou Roland Emmerich) et ça ne vieillit finalement pas trop mal. Sans être le naufrage et le cauchemar décrit par la presse de l'époque, "Waterworld" est finalement un film d'action comme nombre d'autres. Comme quoi, un budget pharaonique n'assure en rien d'entrer dans les mémoires des cinéphiles.







samedi 23 février 2013

Ronin (1998)


Si l'on évoque John Frankenheimer (1930-2002), les cinéphiles du monde entier songent à des classiques du film d'action, comme "Le Train" (avec Burt Lancaster) ou "French Connection II". Ce vétéran, qui fit ses premières armes à la télévision, a également commis d'autres films, plus oubliables (et plus oubliés) dans les dernières années de sa prolifique carrière. L'un de ses derniers films, réalisé en France (pays qu'il appréciait particulièrement pour y avoir tourné plusieurs fois), aurait pu être son feu d'artifice final, mais ne fut pas couronné du succès attendu lors de sa sortie : il s'agit de "Ronin".

Le terme de "Ronin", sans doute énigmatique pour la majeure partie du public (et d'ailleurs explicité dès le générique de début) désigne, dans le Japon traditionnel, les samouraïs sans maître, et n'ayant donc plus d'honneur et de raison d'être. Pour satisfaire au code du guerrier, le Ronin se doit de réaliser le seppuku (le suicide rituel), sous peine de devenir un samouraï errant, sans cause, sans honneur. Dans le film de Frankenheimer, ce terme désigne des hommes de main, recrutés par une jeune Irlandaise pour récupérer, à n'importe quel prix, une valise très disputée. Anciens militaires ou membres d'agences gouvernementales, ces hommes vont devoir tout mettre en oeuvre pour réaliser leur mission.

Le casting de "Ronin" ferait aujourd'hui saliver plus d'un réalisateur : Robert de Niro (qu'on ne présente plus et qui eut, lors du tournage de ce film, maille à partir avec la justice française), Jean Reno, Sean Bean (qui n'avait pas encore endossé le costume du Boromir du "Seigneur des Anneaux"), la très jolie et trop rare Natasha McElhonne (qu'on retrouvera aussi dans "The Truman Show"), Stellan Skarsgard (vu récemment dans le "Millenium" de David Fincher ou dans "Avengers"), Jonathan Pryce (le héros du cultissime "Brazil") et j'en passe.

Ce qui fait la force de "Ronin", ce n'est pas son scénario, vite invraisemblable, où les protagonistes, mercenaires venus d'horizons divers, courent après une énigmatique valise qu'on ne veut pas leur laisser. Il s'agit des scènes d'action, et plus particulièrement des poursuites automobiles, remarquablement orchestrées, malgré leur invraisemblance (vous avez déjà réussi à passer ne serait-ce que la troisième vitesse en plein Paris, vous ?). A l'occasion de ces séquences improbables, mais qu'il réussit à rendre crédibles aux yeux du spectateur, Frankenheimer donne une démonstration de son talent de metteur en scène. 

Cependant, nul n'est dupe, en visionnant ce film. A peine sorti, "Ronin" est déjà le témoignage d'une époque révolue. Comme l'ont dit certains critiques à l'époque, "Ronin" est en quelque sorte le chant du cygne d'un grand faiseur. Plus personne ne croit à l'histoire qui y est racontée, mais chacun va jusqu'au bout de sa tâche. "Mission Impossible" et la saga "Jason Bourne" ont redéfini le genre, et bientôt la technologie va permettre de pousser le curseur encore plus loin, grâce aux images de synthèse.

Du coup, et c'est presque visible à l'écran, toute l'équipe, si elle joue le jeu, semble résignée à voir tomber le rideau sur une époque cinématographique. Comme s'ils avaient déjà la tête ailleurs (et c'est probablement le cas pour Robert de Niro, empêtré à l'époque - à tort- dans une affaire de prostitution), les acteurs manquent de conviction et n'apportent pas au scénario le support qui lui est indispensable.

Impressionnant techniquement parlant, "Ronin" reste cependant un film remarquable parce qu'il est le témoin désabusé d'un passage de relais, inéluctable, mais cependant amer. Si l'on met de côté son invraisemblance, il se (re)visionne avec plaisir. 




samedi 16 février 2013

Cinq ans de réflexion (2012)


En préambule à ce billet, je me dois de justifier sa présence sur le blog. En effet, si "Cinq ans de réflexion" a aujourd'hui l'honneur de ces colonnes, c'est surtout en raison de son échec en France, où seulement quelques dizaines de milliers de spectateurs le virent. Si l'on prend en compte son affluence au niveau mondial, ce film n'est pas l'échec qu'il fut en France.
Voilà pour la justification. Passons maintenant aux choses sérieuses, à savoir la critique à proprement parler de ce long-métrage.


Tom et Violet forment le couple idéal, depuis qu'ils se sont rencontrés un soir de Nouvel An, à tel point qu'ils décident d'officialiser la chose et de se marier. Seulement, la vie en décide autrement et les force à reporter le grand jour. Jusqu'alors promis à devenir un grand chef cuisinier, Tom renonce à ce brillant avenir (pour un temps) et suit Violet jusque dans le Michigan, où elle vient de décrocher un poste universitaire.  

Judd Apatow est, depuis quelques années, devenu le grand gourou de la comédie américaine, et nombre de critiques s'accordent à lui trouver du génie. Mêlant allégrement les thèmes les plus actuels, les sujets les plus graves et les effets les plus crus, l'homme est à l'origine d'un véritable genre qui a ses adeptes, tant parmi les critiques qu'au sein du public. J'avoue ne pas adhérer à ce type de comédie à l'américaine, y préférant de loin son pendant britannique, plus fin et plus pertinent à mes yeux. On m'objectera sans doute (et je suis preneur de vos opinions, chers lecteurs) que ces films sont un reflet de leur temps, qu'ils en adoptent les codes et le ton pour être plus percutants, plus efficaces. 

Quoi qu'il en soit, je n'arrive pas à trouver de génie dans les productions d'Apatow. Qu'il s'agisse de "Funny People", de "40 ans, toujours puceau" ou  de "En cloque mode d'emploi", je persiste à trouver qu'on surestime grandement  ses films, qu'il y soit réalisateur ou producteur. Chacun ses goûts, comme on dit. Il n'empêche que, pour en pas rester sur une mauvaise impression (sur plusieurs, en réalité, puisque j'ai visionné plusieurs de ses films pour tenter de comprendre cet engouement), j'ai courageusement regardé "Cinq ans de réflexion", réalisé par Nicholas Stoller (qui commit précédemment "Sans Sarah rien ne va" et "American trip") et fit ses premières armes en tant que scénariste (notamment sur "Braqueurs amateurs" et "Yes man").

Force m'est d'avouer que ce n'est pas ce film qui me fera changer d'avis sur Judd Apatow et sa bande. S'il l'on y croise quelques jolis moments, ils sont hélas noyés dans trop de longueurs et ponctués par des lourdeurs que je peine à trouver drôle. Pour une réplique fine et bien amenée, il y a dix gags au-dessous de la ceinture. Pour traiter efficacement des états d'âme de ces trentenaires que la vie bringuebale ainsi, n'importe quel épisode de "Friends" (pour citer le classique absolu) est plus drôle et plus touchant. 

"Cinq ans de réflexion" est long, beaucoup trop long (plus de 2 heures) et semble souvent ne pas trop savoir où aller. Enchaînant les situations amusantes (rarement, hélas) et les gags lourdingues (trop nombreux, à mon goût), il accumule les clichés éculés et souvent machistes. 

La présence d'Emily Blunt et (dans un rôle secondaire et étonnant) de Rhys Efans (le colocataire gallois de Hugh Grant dans "Coup de foudre à Notting Hill") pourrait justifier le visionnage du film. S'il est un atout à trouver à "Cinq ans de réflexion", c'est effectivement du côté de son interprétation qu'il faudrait lorgner (encore que Jason Segel, qui collabora au scénario, n'est guère convaincant).

Plombé par ses longueurs et le ton outrancier qu'il a cru bon d'adopter, "Cinq ans de réflexion" rate le coche. Il était possible de traiter des aléas que traverse un jeune couple de façon subtile et fine. A vouloir y aller de la plus épaisse façon, l'équipe aux commandes de "Cinq ans de réflexion" livre un film pénible à voir et vite oublié.


mercredi 13 février 2013

Demain j'arrête

Une fois de plus, je vous livre une petite nouvelle, concurrente malheureuse (mais pas tant que ça, finalement, l'essentiel étant de participer, pas de gagner) au concours organisé par le festival de science-fiction de Roanne
Le thème de la compétition était très ancrée dans l'actualité du mois dernier (fin du monde oblige), puisqu'il fallait y répondre à la question : "Après la fin, quel début ?"
Ce concours-là avait, en plus de son thème, une contrainte supplémentaire, puisque les textes ne devaient pas dépasser les 777 mots. C'est peu, vous en conviendrez (à peu près la taille d'un billet "cinéma" de ce blog), et cela rendait l'exercice d'autant plus intéressant.
Voici donc mon (petit) texte. Bonne lecture !


A l’appel du Grand Patron, nous nous étions tous retrouvés au sommet.
La chose était suffisamment rare pour susciter les inquiétudes. La dernière fois que pareil conclave avait eu lieu, plusieurs d'entre nous y avaient laissé des plumes.
Certes, on se doutait bien qu’il allait se passer quelque chose, qu’une annonce d’ampleur serait faite.Mais le Big Boss a pris tout le monde de vitesse, sur ce coup là.
- J’ai pris une décision : on met fin au projet « Humanité ».
Nous nous sommes tous regardés, estomaqués. Personne n’osait prendre la parole, on aurait entendu un chérubin voler.
- Bien. Je prends votre silence pour un assentiment.
C’est Paul qui a osé prendre la parole le premier :
-C’est une décision irrévocable, Votre Grandeur ?
- Oui. Hors de question de leur laisser une dernière chance, comme avec l’opération « Déluge ». Je me suis fait rouler une fois, ça va comme ça.
De nouveau, le silence s’abattit. Autour de la table, chacun d’entre nous mesurait les conséquences de cette sentence. Parce qu’il savait ce qui se passait sous nos crânes, Il a ajouté :
- Je conçois ce que cela représente pour vous tous…des années de travail et d’effort réduites à néant. Mais, très franchement, je préfère qu’on arrête tout maintenant plutôt que de voir la suite de cette expérience…
Il a continué :
- J’endosse l’entière responsabilité de cette décision. Vous n’avez rien à vous reprocher, vous avez tous très bien travaillé. D’ailleurs, j’ai quantité d’autres projets bien plus motivants à vous proposer à tous.
J’ai levé la main et ai pris la parole :
- Ne peut-on en préserver quelques-uns ?
- Ah...mon généreux Samuel, a-t-Il répondu, en souriant. Penses-tu sincèrement qu'ils aient appris de tout ce qu’ils ont traversé, jusqu’à présent ?
En secouant la tête négativement, j’ai tenté d'argumenter :
-Je sais qu’ils retombent systématiquement dans leurs pires travers, mais ils ont quand même quelques actes positifs à leur crédit...
- Si peu…et, chaque fois, ils réussissent à en faire un moyen de se détruire. Tiens, la religion, par exemple. C’était sensé les guider vers le Bien, si tu te souviens. Résultat : ils se sont trucidés par milliers parce que leur Dieu était meilleur que celui du voisin.
- Pensez à leurs belles initiatives !. L’art, par exemple ! ….
- Ne me dis pas ce que j’ai à faire, Samuel !
Il avait haussé le ton, brutalement.
Je me suis tassé sur mon siège, tandis que des éclairs jaillissaient de ses yeux.
- J’arrête l’expérience... c'est acté.
- Vous avez une préférence quant à la méthode ? On fait comme la dernière fois, avec les dinosaures ? a demandé Raphaël.
- Non, je préfère qu’on agisse de façon moins tapageuse. Et puis, les autres espèces n’ont pas mérité de faire partie des dommages collatéraux. Nous allons leur envoyer une jolie pandémie bien dévastatrice…
- Oh oui, un virus…j’adore l’idée ! a flagorné Matt.
- Je vous laisse régler les détails, mais je veux un truc propre, net, sans bavures, a-t-Il conclu, avant de prendre congé. 

Les Mayas avaient tout faux, avec leur calendrier.
La fin du monde n'a pas eu lieu le 21 décembre 2012.
Tout s'est terminé treize jours avant.

Un virus particulièrement féroce a surgi de nulle part et s'est répandu sur toute la surface du globe. En quelques jours, on a dénombré les premières victimes. Le mois suivant, la maladie était partout, terrassant ceux qui étaient atteints en une poignée d'heures. Les gouvernements eurent beau déclarer la loi martiale, mettre en place tous leurs systèmes de sécurité, rien n'y fit : l'humanité succomba devant un ennemi haut de quelques nanomètres.
Les années passèrent, puis les millénaires.
Je retournais sur Terre, de temps à autre, pour contempler ce qui subsistait de ce projet fou. Les espèces qui avaient survécu à l'homme s'emparèrent de la place laissée vacante. Je parcourais les jardins, les musées, désormais déserts. Et puis, un beau jour, après quelques siècles d'absence, je vins m'abîmer dans la contemplation d'une toile dont j'ai oublié l'auteur.
Je restai des heures, à contempler les teintes épargnées par les âges, avant de réaliser que je n'étais pas seul. Je me retournai. Derrière moi, deux êtres à la peau grise, se tenant par la main, fixaient le tableau. Je me suis éclipsé avant qu'ils ne remarquent ma présence.
 Je n'ai jamais su d'où ils venaient et quels vents les avaient poussés là. Je crois qu'ils y sont toujours, et ont été les premiers d'une nouvelle ère. Je ne suis pas revenu sur Terre depuis, mais je sais que là-bas, quelque chose a recommencé...


lundi 11 février 2013

Un blog neutre en carbone, c'est possible

C'est sans doute une goutte d'eau dans un océan pollué, mais j'intégre ce jour un badge sur ce blog (vous le découvrirez dans la colonne de droite), en faveur d'une démarche "zéro carbone".
D'ailleurs, amis blogueurs, je vous invite à faire de même.
Vous trouverez plus détails sur ce site.

Merci à toutes et tous !

samedi 9 février 2013

Grégoire Moulin contre l'humanité (2001)



Artus de Penguern fait partie de ces acteurs français que bon nombre de cinéphiles connaissent sans nécessairement se souvenir de son nom. Second rôle récurrent dans quantité de longs métrages, il a aussi mis en scène un petit film, "Grégoire Moulin contre l'humanité", tourné essentiellement à Paris (dans le XVIème arrondissement) qui, malgré son peu de succès en salles (à peine 60 000 entrées en France), a ses admirateurs. Alors, qu'en est-il ? S'agit-il d'une perle méconnue du cinéma hexagonal, ou d'un petit film oublié à juste titre ? 
Grégoire Moulin est né sous une mauvaise étoile (c'était un vendredi 13, à la clinique Kafka, ceci explique peut-être cela). Devant son berceau, ses parents se sont entre-tués et, depuis, il est particulièrement sujet au stress et à la malchance. Quittant sa Bretagne natale, il demande sa mutation à Paris. C'est coincé derrière son bureau d'assureur qu'il va découvrir la ravissante Odile Bonheur. Quitte à se faire violence, il va tout mettre en oeuvre pour oser lui parler. Malheureusement, ce soir-là, les événements semblent se liguer contre lui.

On m'avait vendu "Grégoire Moulin" comme une irrésistible comédie déjantée, qui me vaudrait des crampes à la mâchoire à force de m'esclaffer. J'hésite, après visionnage, entre porter plainte pour publicité mensongère ou consulter un médecin afin de vérifier si je n'ai pas sombré dans la plus grave dépression sans m'en rendre compte. 
Ce n'est pas que les aventures de Grégoire Moulin soient ennuyeuses. Certaines scènes sont assez amusantes, je dois en convenir, et, la plupart du temps, il est plutôt plaisant d'assister aux déconvenues de ce pauvre garçon contre qui le sort s'acharne. Mais cette comédie n'a rien d'hilarant et ne déclenchera pas d'éclats de rire tonitruants chez son spectateur. Ce dernier prendra cependant, pour peu qu'il adhère au genre, un vrai plaisir à voir le "héros" du film lutter sans relâche contre la poisse qui semble ne pas vouloir le lâcher.

Moins grinçant que son titre aurait pu le laisser penser, "Grégoire Moulin contre l'humanité" a un énorme mérite : celui d'aller jusqu'au bout de son dérapage pas forcément contrôlé. On lui reprochera, par contre, des répétitions d'effets (les scènes de poursuite sont trop nombreuses, par exemple), qui nuisent à l'efficacité du tout.

Les acteurs sont le point fort de ce film : qu'il s'agisse d'Artus de Penguern, de Pascale Arbillot, ou des nombreux seconds rôles qui émaillent la distribution (et dont la plupart sont venus par amitié pour le réalisateur), tous prennent un plaisir évident au joyeux jeu de massacre auquel ils ont été conviés. On notera la présence de l'inévitable Clovis Cornillac, de Serge Riaboukine ou de Didier Bénureau dans des rôles qui leur vont comme un gant. 

Dernier point positif : Grégoire Moulin (et, je pense, son créateur et interpréte) semble ne pas aimer le football. J'avoue que ça me le rend d'autant plus sympathique (avis subjectif que j'assume parfaitement).

Alors, d'accord, "Grégoire Moulin contre l'humanité" n'est pas la comédie délirante qui vous fera vous rouler par terre de rire, mais ce petit film qui part en vrille donne lieu à quelques bons moments. Ca n'est déjà pas si mal.



dimanche 3 février 2013

Coup d'éclat (2004)


Une fois encore, je commence ce billet par un coup de gueule : qui a  eu l'idée saugrenue de traduire "After the sunset" (soit "Après le crépuscule", pour les anglophobes) par "Coup d'éclat" ? Non content de ne rien vouloir dire, ce titre (vous le vérifierez, si l'envie vous en prend) d'une banalité à toute épreuve est également celui d'un autre film, français celui-là, et qui n'a rien à voir avec celui dont je vais traiter dans ce billet. Pour égarer le spectateur (et les moteurs de recherche), la méthode est efficace.

Un couple de voleurs de haut vol décide de raccrocher, après s'être emparé d'un diamant fabuleux et avoir une nouvelle fois humilié l'agent du FBI lancé à leurs trousses. Arrivés aux Bahamas, les deux tourtereaux vont tenter de profiter de leur retraite dorée, malgré les tentations et la présence du limier qui les pourchasse depuis longtemps. 

Rarement casting aura été si séduisant que celui de ce film : Pierce Brosnan, Salma Hayek, Woody Harrelson, Don Cheadle, Naomie Harris (la  remarquable Eve de "Skyfall") s'y bousculent, sous le soleil et les paysages idylliques des Bahamas. En ces temps de grisaille et de morosité, on ne peut qu'être preneur.
Aux manettes, on retrouve Brett Ratner, metteur en scène des "Rush Hour" et de "Dragon Rouge", et qui réalisera après ce film le troisième (et sans doute le moins bon) volet de la saga "X-Men". Le choix peut s'avérer discutable, mais pourquoi pas, après tout ? 
Cerise sur le gâteau, la bande originale est composée par le grand Lalo Schiffrin (excusez du peu) qui collabora déjà avec Ratner sur "Rush Hour". Autant dire que la production part avec nombre d'atouts dans sa manche et que, malgré son titre stupide en français, "Coup d'éclat" avait tout pour être un bon film.

Je vais faire cesser tout de suite l'insupportable attente qui est la vôtre, chers lecteurs. Malgré tous ces atouts, "Coup d'éclat" n'est définitivement pas un bon film. Encore une fois, la raison tient en un mot : le scénario, ou plutôt sa déliquescence.

Partant d'un pitch qui aurait pourtant pu être prometteur, le scénario part dans tous les sens, presque dès le début du film. Oscillant sans cesse entre "film de casse" et comédie, "Coup d'éclat" ne réussit pas à agripper le spectateur. Les scènes "sérieuses" (relatives à l'activité de cambrioleur de Pierce Brosnan) voient leur effet systématiquement ruiné par les confrontations comiques (surtout entre Brosnan et Harrelson). A vouloir s'emparer du genre et l'allier à un ton plus léger, les scénaristes finissent par rater leur coup : "Coup d'éclat" n'est au final ni un thriller, ni une comédie.



On ne jettera donc pas la pierre à Brett Rattner sur ce coup-là, quoiqu'on pourrait lui reprocher de faire le strict minimum syndical : cette faute est bien mineure en regard de la faillite scénaristique. De même, les interprètes n'accomplissent pas de prouesses, comme s'ils avaient peu de foi dans l'entreprise. Le couple vedette est glamourissime (surtout Salma Hayek), les seconds rôles sont des plus intéressants (même si Woody Harrelson en fait des tonnes), mais la flamme n'est pas là.

Alors, oui, les images sont belles, tant pour les paysages que pour les interprétes (Salma Hayek a rarement été aussi sexy), mais de belles images ne font pas un film. Encore une fois, il manque à "Coup d'éclat" l'ossature nécessaire : un scénario solide, ingrédient indispensable à tout film. 

On a l'impression que l'équipe s'est offert de jolies vacances aux Bahamas. Manque de chance : ils ont oublié d'emmener avec eux le scénariste. Lorsqu'on se frotte à un genre dont les canons ont été définis par des orfèvres comme Soderbergh (la saga "Ocean") Michael Mann ("Heat") ou Quentin Tarantino ("Jackie Brown"), c'est pourtant la moindre des choses.


"Coup d'éclat" hante les grilles de notre TNT nationale. Si l'envie vous en prend, malgré ce billet, de le visionner, ce devrait être aisé. Néanmoins, ce film n'en mérite pas tant...